L'insomnie, un moment prévilégié...

Certains soirs, on se couche sans trop de souci. On se tourne d'un côté, puis de l'autre, pour finalement s'apercevoir que l'on n'arrive pas à s'endormir. Qu'est-ce qui se passe? Puis, soudain, on se rend compte que son conjoint bouge aussi et que sa respiration n'est pas celle d'un dormeur.

- Tu ne dors pas?
- Non.
- Moi non plus.
- À quoi tu penses?
- À toutes sortes de choses.
- Est-ce que tu veux en parler?

Puis s'enclenche une discussion de nuit. Ces discussions ont toujours été pour moi de beaux moments de rapprochement. La nuit, les émotions sont là, mûres, qui ne demandent qu'à être cueillies. Il s'agit seulement de se laisser aller. Ce n'est évidemment pas facile, parce que l'émotion qui vient a toutes les raisons de ne pas être facile à vivre, sinon on y aurait fait face bien avant. Se laisser aller à ressentir une émotion désagréable, pleurer, avoir peur, être angoissé, peut nous permettre de dépasser les malaises. C'est plus facile si quelqu'un nous accompagne, nous rassure. Par la suite, cette émotion laisse place à un sentiment de réalité, la situation devient moins pénible, la vie nous réapparaît plus agréable.

Les échanges de ce type sont très bénéfiques pour un couple. Évidemment, il se produit un rapprochement dans la mesure où l'on est à l'écoute. Cette écoute peut justement être meilleure la nuit parce que notre vigilance à se défendre est moins bonne. Mais, attention! Un des problèmes de la communication dans les couples est que l'autre se sent vite mis en cause à tort ou à raison. Il faut être capable de ne pas contre attaquer, rester ouvert à l'autre même si parfois, il ou elle n'aime pas ce que je suis, ce que j'ai fait. Nous avons aussi nos points sensibles, nos susceptibilités.

Comment faire pour garder la communication ouverte?

  • Rester en contact avec ses malaises et les verbaliser en utilisant le " je ", cela évite que le
    partenaire se sente attaqué.
  • Poser des questions ouvertes: "Qu'est-ce que tu voudrais que je fasse?"
  • Dire son désir d'être en couple:" J'aimerais que ça fonctionne bien entre nous."
  • Admettre ses torts:" C'est vrai que je ne suis pas toujours facile à vivre."
  • Verbaliser ses sentiments positifs:" Je t'aime, je veux améliorer notre relation. "

La discussion devrait permettre d'en tirer une leçon. Qu'est-ce qu'on y apprend sur soi-même? Peut-on changer quelque chose pour améliorer la situation? Comment peut-on éviter ces malaises?

Pour utiliser ses insomnies, il faut développer une attitude positive par rapport à elles. Bien sûr, il y a le travail demain matin, mais même si vous ne dormez pas de la nuit, vous serez sûrement capable de vous débrouiller. Et si vous avez l'esprit ouvert par rapport à vos tracas, il y a peu de chance que vous ne vous endormiez pas le lendemain. Si on regarde ce qui nous tracasse, il faut le faire sérieusement. Quels changements allez-vous faire? Des fois, ce n'est qu'un changement de perspective: arriver à se déculpabiliser, à se sentir pas si épouvantable, à trouver ce qui nous permettra de récupérer une situation où l'on s'est senti coupable ou malhabile, à se rattraper face à une erreur. C'est souvent de cela qu'il s'agit. Il y a des gens qui n'ont jamais de problèmes de sommeil, malgré beaucoup de stress. Ils ont cette capacité de se couper de tous les tracas dès qu'ils ont la tête sur l'oreiller. On peut dire qu'ils ont une confiance en eux qui leur permet de savoir qu'ils vont s'en tirer et trouver la ou les solutions. Cette capacité est très utile, elle leur permet de conserver toutes leurs énergies, d'être frais et dispos face à la nouvelle journée, mais cette capacité de se couper peut aussi entraîner des problèmes plus graves si l'on en abuse. Elle peut mettre l'équilibre de la personne en péril, faute de s'être remise en question. On en revient toujours à une question d'équilibre pas facile à atteindre. Jusqu'où irons-nous dans la mauvaise direction avant de s'apercevoir de notre erreur? Quelqu'un qui a pratiquement toujours raison va avoir plus de difficulté à reconnaître que, cette fois-ci, il est dans l'erreur. Et quelqu'un qui se sent souvent dans l'erreur aura énormément de difficulté à affirmer son opinion.

Bombardement de l'intérieur

L'insomnie est un signe qu'il se passe quelque chose d'important, que nous n'avons pas pris suffisamment le temps d'écouter. Autant pouvons-nous être bombardé par l'extérieur pendant le jour, autant lorsque nous nous arrêtons, c'est l'intérieur qui nous bombarde. La nuit est ainsi propice à nous mettre en contact avec ce que nous vivons intérieurement. Une remise en question s'impose. Sur le plan psychologique, l'insomnie est un signal avertisseur qui devrait nous obliger à nous questionner: quelque chose ne vas pas. Si cela nous préoccupe au point de nous empêcher de dormir, alors c'est important et il faut s'en occuper tout de suite.

Sinon, que nous arrive-t-il?

Sinon, nous risquons de ne plus avoir d'emprise sur notre situation. Peut-être que cela se réglera tout seul, ou peut être pas. Si vous ne prenez pas les choses en main, vous laissez votre destinée aux mains du hasard, de l'horoscope ou de la voyante.

Et si ca ne se règle pas, que va-t-il arriver?

Comme thérapeute, je rencontre souvent des gens qui n'ont pas pris le temps nécessaire à une remise en question. Ils arrivent non plus avec un problème, mais avec une série de problèmes qui se sont développés. Il devient alors de plus en plus difficile pour la personne de comprendre le vrai problème, souvent caché par toutes sortes d'autres symptômes. Le travail thérapeutique s'avère alors plus long et plus complexe.

André Surprenant, psychologue  

 


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