Évaluation de la relation

Est-ce que je l'aime encore

Lors d'une période de conflits à répétition, les conjoints sentent qu'ils sont dans une impasse. C'est-à-dire qu'ils n'arrivent plus à sortir de l'engrenage que créent la dispute et le ressentiment. Il arrive alors que l'un des conjoints remette profondément en question ses sentiments pour l'autre : "Est-ce que je l'aime encore? Sinon, est-ce que l'amour peut renaître dans un couple?

Qu'est-ce qui peut amener un conjoint à se poser de telles questions? Probablement des pensées comme : <Je n'ai pas envie d'être proche de lui ou d'elle. Ce qu'il ou elle dit ne m'intéresse pas. Je ne le ou la trouve plus intéressant(e). Quand il ou elle me touche, j'ai envie de me sauver en courant. Je ne me sens pas respecté(e) par lui ou elle. J'ai seulement envie de faire des projets personnels. Je me vois très bien dans un 3 et demi bien à moi, à faire seulement ce qui me tente et quand je le veux >.

Devenir inconfortable à l'extrême avec quelqu'un qu'on a déjà ressenti comme très intime peut être déstabilisant. On peut en arriver à ne plus se reconnaître soi-même, ne plus savoir ce que l'on veut et perdre ainsi l'estime de soi. La réponse à savoir s'il reste de l'amour ou pas est difficile à trouver. Il peut paraître impossible que l'être que l'on a jadis choisi entre tous et toutes soit devenu tout à fait indésirable. On a peur de commettre l'irréparable en prenant la décision de rompre. <Existe-t-il dans le monde quelqu'un d'autre que l'on pourra aimer autant qu'on l'a aimé(e) lui ou elle? Sinon, à quoi bon s'en détourner, puisqu'on a fait un bon bout de chemin ensemble, qu'on a des enfants en commun, en plus d'un tas de choses.>
Encore faudrait-il que ce soit supportable, sans parler d'agréable. Alors comment s'expliquer ce qui arrive et parvenir à raviver la flamme?

Chose certaine, on a jamais mis les pieds dans une relation importante par hasard. Nous y sommes pour ainsi dire préparés par tout notre passé. En
effet, des recherches ont prouvé que le pattern d'attachement qu'on développe dans l'enfance est un précurseur de celui que l'on va avoir une fois
adulte. Ce qui revient à dire que la façon dont on vit sa première relation d'amour va façonner la façon dont on va vivre ses relations amoureuses à l'âge
adulte.

Au début, les deux partenaires sont très à l'écoute l'un de l'autre et sont pleins de petites attentions. On a été attiré vers l'autre à cause de son physique,
des valeurs, des goûts que l'on a en commun, et tout ça est encore vrai après un certain temps. Sauf que le quotidien fait ressortir des besoins plus
profonds qui peuvent remettre en question notre engagement. Le comportement naturel qui remonte alors à la surface est relié à notre pattern
d'attachement. Celui-ci n'est pas simple en général et la personne qui est en contact avec nous peut trouver difficile de décoder ce que l'on attend d'elle
ou ce qu'elle a le droit d'être sans qu'on la rejette. Est-elle acceptée et aimée telle qu'elle est? Elle peut se sentir menacée par nos attentes, ou encore se
sentir repoussée par notre apparente indifférence à son égard en certaines circonstances.

Pour un certain temps, les conjoints tentent de s'adapter du mieux qu'ils peuvent à ces façons d'être de l'autre, qui étaient plus ou moins camouflées
auparavant par le nuage rose de l'amour naissant et de la découverte. Mais il se peut l'un des deux finisse par se sentir lésé par les aspects boiteux qui se développent dans la relation. Par exemple, l'autre est perçu comme distant, offrant peu d'ouverture à mes confidences ou à mes demandes d'intimité.
De sa part, je suis perçue comme menaçante avec tous mes désirs, mes rêves, mes démonstrations d'affection et mes tentatives de l'inclure dans mes
projets.

Quoi faire avec ce méli-mélo de perceptions qui nous laisse insatisfait(e) et blessé(e)? Quand on en arrive au point où toute discussion dégénère en
conflit ou en frustration mutuelle, il faut arrêter le processus et cesser de voir l'autre comme son ennemi no 1. La condition première du changement
dans le couple est l'ouverture des conjoints l'un à l'autre.

Que veut dire s'ouvrir pour un couple? Il s'agit tout d'abord de laisser tomber la garde, le bouclier que l'on a mis devant soi pour se protéger des
attaques ou du rejet et de parler de sa propre peine, de sa propre difficulté à comprendre ce qui arrive en demandant à l'autre d'écouter tout
simplement, mais avec attention, ce que l'on a à dire. L'autre qui, pour la première fois depuis longtemps, ne se sent pas accusé, va peut-être se sentir
plus à l'aise de baisser aussi sa garde et faire part de ses propres blessures et besoins.

Comment créer la sécurité nécessaire pour baisser sa garde sans se sentir trop vulnérable? Il est très possible que les conjoints aient besoin d'une aide
extérieure pour le faire. Le contexte de la thérapie peut être nécessaire pour se permettre de redécouvrir la confiance en l'autre à travers le
rapprochement et l'écoute des vulnérabilités réciproques. Dans cette optique, on a besoin d'un arbitre qui veillera à ce qu'on ne se blesse pas et qui
évitera qu'on en sorte encore plus meurtri. Le couple fait alors l'expérience qu'il est beaucoup plus facile de se parler dans le bureau du psychologue. En effet, il ne s'agit pas de dire les choses, il faut d'abord bien identifier les désirs et aspirations de chacun. Souvent les deux partenaires veulent la même chose, mais ne parviennent pas à se rejoindre parce que toutes sortes de ressentiments et de souvenirs viennent embrouiller les discussions et les
conduisent à des pôles différents.

Il est certain que l'entente de devient pas parfaite dans l'immédiat, mais cette étape est la première d'un travail de reconnaissance et de rapprochement.
et, dans bien des cas, si l'engrenage est stoppé à temps, une série de rencontres régulières avec un(e) psychologue aidera à remettre la relation sur les
rails et le couple pourra ensuite continuer par lui-même à développer son intimité sur des bases plus authentique et plus solides.

Nicole Hébert, psychologue


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